Tuesday, September 4, 2007

Day-SEVEN : Carrick-a-Rede

Vendredi 17 août
Carrick-a-Rede - Cushendum

Après avoir pris ma douche, j’ai préparé du café.
Pendant que je préparais mes affaires pour la journée, j’ai reçu un appel d’Evelyn me disant que comme il faisait beau, si je voulais Elisabeth pouvait me conduire jusqu’au Giant’s. Je n’ai pas hésité une seule seconde.
Une petite demi heure plus tard je partais avec Elizabeth pour une nouvelle séance photos à la Giant’s. Cette fois je m’étonne de ne pas voir Ollie. Elizabeth me dit qu’il est avec Stéphanie.
Nous arrivons au parking. Il fait beau, il est encore tôt. À peine huit heures et demie. Elizabeth me dit de prendre tout mon temps, qu’il fait beau, et qu’elle a pris de la lecture. Que je ne dois pas m’inquiéter pour elle qu’elle sera bien.


Il n’y a personne, je emprunte le chemin qui descend vers le site principal. Je sais maintenant que rien que le site principal peut prendre une heure. Comme j’ai déjà plein de photos, je m’attache à essayer de ne refaire que celles qui peuvent être valorisées par la lumière incidente du soleil.
Je profite à nouveau de ma solitude dans ce site grandiose.
J’emplis mon âme du bruit des vagues et de l’odeur saline. J’essaie de m’imprégner au maximum, afin de pouvoir, plus tard, par simple évocation des bruits et des odeurs, être transporté virtuellement, revenir sur les lieux.

Une heure est passée en un clin d’œil. Je ne monterai pas à la falaise. Cela prendrait trop de temps. Je remonte donc le chemin et retrouve Elizabeth.
Après quelques échanges téléphoniques avec Evelyn, nous n’allons pas rentrer à Portstewart, mais rejoindre les autres à Carrick-a-Rede.
Comme nous sommes en avance sur les autres. Elizabeth me propose d’aller faire un tour dans un tout petit port. Pendant que j’explore les environs elle est allée plus loin se baigner dans une sorte de piscine naturelle qu’elle m’avait montré plus tôt. Nous nous étions donné rendez-vous à dix heures moins dix à la voiture. Je suis arrivé quelques minutes plus tard car je voyais de loin qu’elle n’était pas encore à la voiture. Il paraît que j’aurais pu voir des phoques ou autre animal similaire dans les environs. Je n’avais certainement pas compris quand elle me l’avait dit. Autrement j’aurais essayé d’en repérer.
Nous reprenons la route. Les autres ne sont pas encore là. Nous nous garons. Comme je n’avais pas pris de déjeuner et que justement la cafétéria vient d’ouvrir nous avons prix du café et j’ai pris un sandwich.
Pendant que je termine ma collation les autres arrivent.

Nous allons tous ensemble à l’entrée de l’enceinte. Avant d’arriver au pont suspendu il faut parcourir un sentier d’un kilomètre environ. C’est une approche en douce, sorte de purgatoire, car elle permet de se mettre en condition physique et mentale, en profitant des magnifiques vues de la côte avant de faire le premier pas sur le pont suspendu..
En fait le pont existe depuis environ 350 ans. Les cordes ont été changées depuis, mais le passage a été emprunté depuis des années par des pécheurs qui allaient sur l’île pour accéder aux meilleures places pour attraper les saumons migrateurs.

Le pont relie la terre ferme à un île sur une distance d’une quarantaine de mètres. Afin d’éviter de surcharge, et régler en quelque sorte la circulation pédestre sur le pont, il y a un accès contrôlé, n’autorisant qu’un nombre limité de personnes à la fois sur le pont.

Heureusement nous sommes assez tôt car il y a déjà une petite attente avant de pouvoir traverser. Le pont a été tellement bien sécurisé que cela ne m’impressionne pas outre mesure. Cela reste quand même une expérience spéciale. J’aurais voulu traverser l’ancienne version du pont sous une tempête. Cela aurait probablement eu toute une autre atmosphère.
Nous sommes tous passés. Comme les autres visiteurs, nous déambulons sur l’île en prenant des photos avant de reprendre le chemin de retour et attendre notre tour pour traverser à nouveau.
Comme je disais tantôt, heureusement que nous sommes venus tôt. J’estime la durée d’attente pour la file de l’autre côte à plus d’une demi-heure pour les derniers.

Le soleil nous régale de ses rayons agréables. Je pense que c’est bien la première fois depuis que nous sommes ici qu’il est présent d’une manière aussi nette.

Nous allons continuer la journée en prenant la route côtière qui va jusqu'à Cushendum. Je suis dans la voiture d’Elizabeth avec Armel. La route est pittoresque surtout car elle a été collée au sol, sans autre aménagement ou souci qu’in peu de macadam soit sur l’ancien chemin ou piste.
Pour certains cela pourrait provoquer un sentiment de développement précaire. Moi je le prends comme c’est. Certes probablement les moyens financiers de l’époque de la construction de la route n’étaient pas au sommet de ses possibilités, mais cela ne fait qu’ajouter du charme. La route serpentine et épouse les moindres bosses du sol. Elle est étroite, mais assez large pour permettre le croissement de deux véhicules pour autant que ceux-ci fassent un peu d’attention.

Cushendum est un petit point humain dans cette nature verte. Une plage presque déserte. Un petit port. Quelques petits magasins. De la tranquillité, beaucoup de tranquillité.

Nous avons pris notre repas, une sorte de brunch qui nous a bien satisfait. Après le repas nous sommes allés faire une promenade en boucle. Nous avons longé une sorte de ruisseau aux eaux rouges, à cause de la décomposition naturelle de la végétation, probablement de la tourbe. La fin du parcours nous a fait rentrer sur la plage jusqu’à l’emplacement où nous avions laissé nos voitures.

Pour le retour nous avons été un peu plus directes et pris une des routes rectilignes sans spécial intérêt, faites uniquement pour se déplacer vite.

Nous sommes invités à prendre le té/café chez Mary et Grace, où Evelyn et Elizabeth logent pour le moment. Nous sommes accueillis dans le salon. Grace apporte les gâteaux et le café. Nous discutons de nos aventures, de nos exploits, de l’Irlande un peu de tout.

On voit que c’est une famille principalement composée du genre féminin. Il est probable qu’à certains moments il y ait ses tensions et ses mésententes comme dans toutes les familles, mais on devine, on perçoit qu’il y a une très grande complicité.
Mary, la maman, est aux anges,entourée de ses filles.
Lorsque les autres partent, je reste un moment pour bavarder avec Mary. Elle veut s’entretenir avec moi sur la résolution de sudokus. En effet à un moment, l’année passée, je lui avait fait parvenir un manuel décrivant plusieurs techniques et astuces pour leur résolution : le candidat unique, les doubles paires, les multi ligne, les paires/triplés apparents, les non apparents, le x-wing, le swordfish, le forcing chains, le nishio, etc.

Elle est tracassée parce que des notes que je lui avais fait parvenir il y a certain passages qu’elle ne comprend pas trop bien.
Nous prenons le sudoku qu’elle est en train de résoudre. Je la félicite déjà par le fait du respect scrupuleux de l’ordre dans la notation au crayon (pencilmarks)
En général les gens ne s’occupent pas trop du respect de l’ordre, ils notent les possibilités au crayon selon elles se présentent. Ceux qui avons l’esprit cartésien notons rigoureusement selon une méthode déterminée et fixe. On divise mentalement le carré en trois lignes, trois colonnes. La première ligne contiendra le 1, 2 et 3, la deuxième le 4, 5 et 6 et la troisième le 7, 8 et 9. Ainsi, le numéro 1 sera toujours en haut et à gauche, le numéro 5 en plein centre, le 6 sur la ligne du milieu complètement à droite. Cette manière de procéder permet de déceler visuellement des paires et des triples apparents. A la limite on n’aurait même pas besoin d’écrire le numéro. Il suffirait de mettre un point à l’emplacement adéquat. Le reste ne serait qu’une espèce de jeu de dominos.
Comme je disais elle est très appliquée, elle veut bien faire. Par moments j’ai l’impression d’être devant un enfant qui veut montrer comme il a bien fait son devoir. C’est touchant, elle est touchante.
Cote à cote nous regardons ensemble la grille qu’elle a déjà remplie. Je vois tout de suite des candidats uniques par l’élimination due à des paires apparentes. Je ne dis rien, pas encore, je lui laisse le temps de parcourir les lignes. D’autant plus que sa vue n’est plus ce qu’elle était.
Je parcours avec elle et je lui fais voir certaines actions d’élimination. Elle les aurait trouvés toute seule, mais je veux m’assurer qu’elle retient le principe. Nous passons ainsi en revue des plus simples techniques aux moyennes.
Je sens que nous arrivons à la clé de sa détresse. Elle est tracassée parce qu’elle n’a pas bien compris le fonctionnement de l’x-wing et du swordfish. Je ne dirais pas qu’elle saute de joie, mais elle est rassurée lorsque je lui avoue que moi non plus, je ne les ai pas trop bien compris non plus. Qu’à chaque fois que je n’avance plus dans un sudoku, je dois relire ces deux techniques au cas elles pourraient s’appliquer.
Je lui ai enlevé un poids dans l’âme. Je la sens même plus légère.
Elle est désolée de ne pas parvenir à faire plus de trois sudoku par jour. Elle est navrée de devoir parfois abandonner et ou de devoir en laisser de côté parce qu’elle est fatiguée. Je la « gronde » gentiment. Je lui dis qu’il ne faut pas prendre ces résolutions comme une tâche à remplir, mais comme un passe temps. Cela doit rester un plaisir d’en faire. Si un jour elle ne fait qu’une ligne ou une case, cela n’a pas d’importance. Personne ne lui demandera de comptes à rendre.
Elle me parle un peu d’elle. On lui déconseille d’aller se baigner. Alors qu’elle a tant aimé cela dans sa vie. Je lui dis alors que c’est un peu normal. Qu’elle pourrait tomber. Que j’aimerais pouvoir être comme elle à son âge. Elle me parle un peu de ses filles, de la maison, de ce fils décédé …
Je l’aime bien. Elle est alerte, elle est forte et en même temps si fragile et comme toutes les personnes de son âge elle est un coffre à souvenirs. J’imagine que cela n’a pas dû être facile dans sa jeunesse, et puis plus tard pendant la période des troubles.
Grace, après nous avoir laissés seuls un bon moment, est venue se joindre à nous.
Au but d’un moment je leur annonce qu’il faudra que je rentre pour aider les autres à préparer le souper. Je prends congé et en sortant je suis un peu désorienté. Ce n’est qu’au but de quelques pas que je reconnais l’endroit. C’est en fait la rue parallèle à la route de la côte. Je suis passé ici en vélo à plusieurs reprises.

A une centaine de mètres, il commence à pleuvoir. Lorsque j’arrive, les préparations culinaires sont bien avancées. Aujourd’hui c’est des tomates, courgettes et poivrons farcis. Avec des pommes de terre et du riz en accompagnement. Comme entrée je refais les « torrades de pa amb tomaquet i anxoves » pour que nos invités du jour puissent les goûter aussi. Le dessert c’est le pudding préparé par Rosanne mercredi passé.

Les invités arrivent et nous passons au salon pour l’apéritif. Cette fois-ci, nous sommes deux de plus que mardi passé. Les places se font chères à la cuisine. Comme mardi les anchois ont du succès. Les dates cette fois-ci ont été dénoyautés et farcies de fromage. De plus on a ajouté, à ma demande, des champignons farcis que j’ai préparé selon l’habitude. Le plus dur a été de trouver du fromage gruyère.

Il semblerait qu’à la fin du souper deux jeunes filles qui doivent rentrer avec George et Laurena, nous ferons une petite démonstration de danses folkloriques.

Les farces ont eu un grand succès. Et malgré la pénurie de place nous avons pu manger confortablement. Après le dessert de Rosanne, nous avons accompagné le café de gâteaux de La Bisbal que j’avais apporté expressément de mon village.
L’ambiance monte d’un cran et les filles qui sont arrivées un peu avant le dessert et Laurena chantent des chansons ce circonstance. Rosanne et les autres en font de même. Quand ils s’adressent à moi je leurs dis que sans guitare je ne puis rien faire. En fait c’était une excuse, plausible, mais une excuse quand même.

La chanson et moi c’est toute une histoire d’haine et passion. J’aime en général chanter, mais très souvent pour moi. C’est comme un rite intime. Il m’arrive de chanter en publique, je l’ai déjà fait à plusieurs reprises, ce n’est donc pas que je sois gêné, mais dans des circonstances similaires à ce soir, le gens s’attendent à ce que je chante des chansons entraînantes, c’est normal, il y a de l’ambiance et je peux y participer, mais pas en tant que moteur. Je ne connais pas tellement de chansons à faire participer le chœur. Pour ne pas casser l’ambiance je préfère m’abstenir.

Lorsque je chante c’est plus près du récital. D’ailleurs les chansons que je chante sont rarement entraînantes. C’est plutôt la mélancolie, la poésie, le texte.
J’accorde beaucoup d’importance au texte. D’ailleurs, aujourd’hui on chante n’importe quoi et sur n’importe quoi.
C’est peut-être une autre forme d’art, mais ce n’est pas toujours de mon goût. Je suis probablement vieux jeu, si c’est cela je l’admets, quoique je préfère le label de romantique.

Les filles ont dansé dans le salon d’hiver, ma chambre.
Malgré le peu de place leur performance a été bien effectuée. Je les ai filmées pour avoir le son aussi.

Il se fait tard et les invités commencent à rentrer chez eux. Nous avons passé une soirée très agréable.
La remise en ordre de la cuisine et du salon s'est faite en deux temps trois mouvements. Quand tout le monde s’y met c’est bien facile. D’autant plus que c’est spontané. Au plus vite tout est en ordre, au plus vite nous sommes libérés des tâches ménagères.

Comme à l’habitude les filles sont allées dans leur chambre. Armel et moi traînons toujours un peu, l’un lit l’autre écrit et vice-versa. Comme si nous avions besoin, de nous prouver à nous-mêmes, d’avoir fait quelque chose de productif avant de nous coucher.

Pour ma part c’est n’est pas que je doive me prouver cela mais, il est rare que je reste à rêvasser. Il m’arrive souvent que je m’installe lire, mais dans certaines circonstances j’essaie de tirer profit des moments creux. J’ai toujours quelque chose à faire, à régler. Il y a toujours, si on veut, des menues tâches inachevées. Même quand j’attends dans une file je trouve toujours une occupation qui me fait sentir que je n’attends pas inactif. C’est une sorte de course contre le gaspillage de temps.
C’est peut-être maladif, mais inoffensif en tout cas.

Finalement nous nous sommes retirés nous aussi. J’ai mis de la musique à volume réduit pour ne pas déranger les autres. J’écoute pour l’énième fois Katie Melua.

Demain, ou plutôt tantôt, j’irai avec Evelyn chez George et Laurena, car elle avait oublié de leur demander d’apporter de quoi réparer le pneu crevé du vélo.
Je me couche finalement vers minuit et demie.

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